Commission stratégie, finance, relance

2022, l'année des bouleversements sur l'environnement financier

    Hausse des taux d’intérêt, échéances des PGE, correction des marchés, augmentation des défaillances voire future récession : 2022 sera l’année des bouleversements de l’environnement financier.   Et ceci alors même que les entreprises doivent faire face à l’enchainement de crises, lesquelles constituent autant d’opportunités...

    Hausse des taux d’intérêt, échéances des PGE, correction des marchés, augmentation des défaillances voire future récession : 2022 sera l’année des bouleversements de l’environnement financier.   Et ceci alors même que les entreprises doivent faire face à l’enchainement de crises, lesquelles constituent autant d’opportunités...

    Les experts de la commission stratégie, finance et relance du MEDEF31, Caroline TOURREL, Responsable des Marchés Professionnels, Entreprise, Agriculture & Institutionnel au sein de Banque Populaire Occitane et François BOURGOIN, directeur associé chez KPMG, ont partagé les analyses de banquiers et d’investisseurs de la place à travers deux interviews.
    Leurs visions fournissent des repères aux stratégies financières de nos PMEs.

     

    Les financements bancaires en Occitanie - septembre 2022

    • Sébastien Cocq (SC), Directeur Centre d'Affaires Entreprises chez Banque Courtois - Groupe Crédit du Nord
    • Caroline Tourrel (CT) Responsable des Marchés Professionnels, Entreprise, Agriculture & Institutionnel au sein de Banque Populaire Occitane

    Quel sera le bilan de votre activité pour l’année 2022 ?
    SC : 2022 sera un très bon exercice pour le marché entreprise de la Banque Courtois. Il est porté par un excellent premier semestre, sans que les craintes d’une « rentrée à l’arrêt » ne se soient concrétisées. Les volume de crédits aux entreprises auront enregistré une croissance à deux chiffres.
     
    CT : Pour la BPOC, c’est une très belle année de production de crédits aux entreprises qui s’annonce. A fin 08/22, notre production de crédits a augmenté de +7% par rapport à 08/2021 et nous continuons à accompagner très largement nos clients sur notre territoire. 

    Quels sont les types de financements réalisés ? 
    SC : Les demandes de financements restent variées : investissements, BFR, programmes immobiliers, opérations de LBO avec un phénomène de concentration de certains secteurs d’activité. Certaines transactions retrouvent des multiples de valorisation plus normés, ce qui rend le montage moins risqué et plus facilement finançable. Les secteurs qui ont le vent en poupe restent sur des multiples élevés (du fait de la liquidité disponible).

    CT : Tous les types de financement sont représentés dans la production 2022 : des opérations de financements des CAPEX, des opérations de LBO et des opérations de financement immobilier.  

    Le contexte actuel vous amène-t-il à analyser les dossiers différemment ? 
    CT : Le contexte économique est chahuté en cette année 2022 avec le retour de l’inflation comme un phénomène durable et non transitoire, la crise énergétique, la pénurie de certaines matières premières, les problèmes liés aux ressources humaines. Ce contexte pèse sur le moral de nos chefs d’entreprise. 
    Mais ce qui compte aujourd’hui dans la résilience d’une entreprise c’est l’agilité, la vision et la stratégie du chef d’entreprise, points essentiels dans nos analyses. Notre rôle en tant que banquier et partenaire de l’entreprise, c’est d’être apporteur de solutions.  
    Nous notons que certains secteurs d’activité sont très résilients notamment ceux en amont de la chaîne de production. D’autres secteurs sont beaucoup plus impactés et doivent très largement modifier leur business model.     

    SC : Certains secteurs d’activité sont porteurs, d’autres sont plus nettement impactés du fait du contexte inflationniste et des pénuries (avec la main d’œuvre qui reste souvent la première préoccupation). La capacité à s’adapter associée à une vision stratégique affirmée deviennent clés, le banquier à un vrai rôle à jouer aux cotés de ses clients dans l’analyse et la recherche de solutions. Dans un contexte de bilans souvent alourdis par la dette (PGE notamment), les plans de financements doivent s’aménager, nous nous attachons à accompagner nos clients dans ces réflexions. La bonne connaissance de nos clients et de leurs modèles est plus que jamais fondamentale.

    L’accès au crédit est-il plus difficile ? 
    SC : Dans les faits, le marché bancaire est concurrentiel et le nombre de refus de financement reste marginal. Les groupes bancaires français sont solides et structurés. La création très prochaine de SG Courtois en Occitanie, porte cette ambition affirmée d’accompagnement et de financement de l’économie locale grâce à des moyens significatifs investis en région.

    CT : L’accès au crédit n’est pas plus difficile. L’analyse qualitative du dossier reste prépondérante et la relation de confiance entre la banque et le chef d’entreprise reste un élément clé. La BPOC a par ailleurs un bilan solide lui permettant de continuer à accompagner ses clients dans la distribution de crédits. 

    Quelles sont vos prévisions pour 2023 ? 
    SC : Il est trop tôt pour se prononcer mais il n’y a pas de signes avancés d'alerte à ce jour. En revanche, nous assistons à une reprise de la sinistralité depuis le printemps, elle reste sur des niveaux inférieurs à l’avant crise COVID. L'inquiétude des chefs d'entreprise est quant à elle réelle.
    Avec l’évolution marqué des taux, les frais financiers redeviennent « un poste à considérer et à piloter ». Associé au contexte d’inflation et d’incertitude décrit, les projets doivent parfois être aménagés (redimensionnement, échelonnement…) avec des marges de sécurité à intégrer dans les BP. Là aussi, nous avons un rôle important d’accompagnement de nos clients. 
    La RSE s’invite comme une démarche de fond en conseil et accompagnement en financement bancaire et aussi comme une attention d’urgence en risque pour les secteurs fortement exposés aux prix de l’énergie qui devront accélérer leur transition. 

    CT : Il est difficile aujourd’hui d’anticiper quoi que ce soit. Les chocs exogènes sont de plus en plus nombreux, imprévisibles et s’enchaînent très rapidement. 
    Les dispositifs de PGE ont permis aux entreprises de passer la période de la crise sanitaire, évènement inédit, et le nombre de défaillances d’entreprises restent faibles aujourd’hui malgré le remboursement des PGE qui a débuté. 

     

    Marché des investissements en fonds propres en Occitanie - septembre 2022.

    - Bruno de Cambiaire (BdC), Président chez iXO Private Equity
    - Alexandre Despax (AD), Directeur de participations at IRDI Capital investissement
    - Laurent Savade (LS), Directeur des Investissements de Multicroissance et Sud Croissance 
    - Interrogés par François Bourgoin, Associé KPMG

    Quel sera le bilan de votre activité pour l’année 2022 ?
    AD : Tous les compartiments du marché sont actifs : développement, transmission, amorçage technologie. Avec des secteurs favorisés car résilients : comme les services, logiciels, maintenance industrielle…

    BdeC : Très bon exercice 2022 en nombre de deals et en qualité d’opérations.

    LS : L’année 2022 sera bonne sur la même lancée que 2021. L’année 2021 avait été une année record en termes de croissance avec un effet rattrapage de l’année 2020 (année COVID). Le premier semestre 2022 est excellent mais pendant l’été le dealflow a ralenti. 65% des fonds levés sont à destination des transmissions principalement. 

    Quid du flux d’affaires à date ?
    AD :  Notre Deal flow est important. A noter des opportunités de croissance externe pour des entreprises consolidantes dans des contextes exposés à des risques spéciifques ( difficultés liées à la hausse de l’énergie, approvisionnements...)

    BdeC :  Toujours des deals en perspectives mais avec des critères plus sélectifs : analyse des business models, valorisation, et financements.

    Vous mentionnez une attention particulière sur les business models ?
    BdeC : II est important de réfléchir aux incidences de la hausse des couts de l’énergie ou des pénuries et la capacité de l’entreprise à les répercuter.
    Également, il faut apprécier dans quel cycle se trouve l’entreprise : rattrapage post covid (expl tourisme ) ou au contraire un cycle long ( exemple aéronautique). L’incidence des changements de mode consommateurs… 
    Il peut y a voir aussi des interrogations inhérentes aux métiers : exemple pour l’export ou le retournement de conjoncture est beaucoup plus marqué qu’en France ou pour ceux de la transition énergétique, compliquée à mettre en oeuvre : difficultés administratives, technologiques, environnementales.

    LS : Nous constatons une perte de confiance chez les chefs d’entreprise et les investisseurs. Les rentabilités sont impactées de l’effet dollar pour les entreprises importatrices, en raison de l’inflation, de la hausse des coûts de l’énergie ou encore de la hausse des charges de personnel. L’augmentation des taux intérêts va également fortement impacter les P&L dans les opérations de LBO. 

    Depuis début 2022, les BP sont beaucoup plus challengés, notamment sur les sujets de la marge brute et des anticipations de variations de prix et de disponibilité des matières premières. Nous sommes très attentifs à la stratégie des dirigeants face à la hausse des coûts de l’énergie (transition environnementale). L’agilité du chef d’entreprises devient un axe majeur. Le pouvoir sera dans les mains de ceux qui auront les stocks et des fonds propres suffisants pour financer la hausse du BFR.

    Comment les valorisations se comportent-elles ?
    AD :  IL y a une polarisation des valorisations selon les modèles d’affaires : les modèles le plus résilients et/ou récurrents en sortent encore plus soutenus qu’auparavant.  Les valorisations sont entamées par les anticipations de crises notamment les couts de l’énergie.
    BdeC : La baisse des marchés influent sur le non coté et participent au mouvement de baisse. Mais les baisses de valorisation vont créer des opportunités…

    Comment évoluent les financements des opérations
    BdeC : Outre la remontée des taux, le traitement des dossiers est plus long voire plus compliqué qu’il y a 6 mois. 
    « Il y a un retour à l’orthodoxie ». Les financements intègrent une décote correspondante à l’appréciation du risque, avec des ratio de financement plus contenus ( 3 à 3,5 fois EBE), des Covenants plus stricts et la disparition des dettes in fine. 
    Nous avons donc des opportunités d’investissement en fonds propres, notamment sur des opérations qui auraient pu être encore récemment se financer à 100%.


    Quelles sont vos perspectives 2023 ?
    AD : d’une façon générale, de nombreux projets vont alimenter l’activité.
    Nous observons par ailleurs que les dirigeants cherchent des parades, des plans B face aux difficultés rencontrées : économie d’énergies, techniques de recrutements, durée de validité des devis… ils ont besoin de conseils et l’investisseur a son rôle à jouer, notamment en partage d’expérience
    BdeC : En France, le rôle protecteur de l’Etat qui a déversés des liquidités va continuer et « limiter la casse ». Donc sauf cataclysme…  L’enjeu c’est la hausse des salaires. 

    LS : Certains secteurs restent dynamiques et peu affectés par cette crise sans précédent : santé -dépendance, NTIC (en particulier les ESN et la cybersécurité) et le luxe qui répercute les hausses de prix.Les multiples de valorisation devraient baisser.  

    Votre mot de conclusion ?
    LS : La qualité de l’information financière et extra-financière va être majeure pour l’année 2023 : exactitude et détail dans les reportings réalisés, qualité du SI, qualité du management et gouvernance. Et comme dans toutes situations complexes, il y a des opportunités à saisir !

    AD : un conseil aux chefs d’entreprises : être vigilants du fait de la détérioration du contexte mais rester opportunistes. 

    BdeC : Notre ancrage est géographique et iXO a toujours investi chaque année, y compris en 2008! nous serons présents.